L’eau comme fluide caloporteur

Jusqu’à une température de 90 °C au sein du thermorégulateur, on utilise presque exclusivement de l’eau comme fluide caloporteur. Au-delà de 90 °C, l’utilisateur doit décider s’il faut utiliser de l’eau ou de l’huile caloporteuse. Au cours des dernières années, les appareils à eau sous pression se sont imposés pour des températures jusqu’à environ 250 °C. L’article ci-dessous présente les avantages et les inconvénients de l’eau utilisée comme fluide caloporteur et explique les mesures nécessaires pour son exploitation correcte.

Avec ses très bonnes propriétés thermiques, l’eau se distingue comme fluide caloporteur. La capacité calorifique - la quantité d’énergie thermique qu’un fluide caloporteur peut transporter - de l’eau est environ deux fois plus élevée que celle des huiles caloporteuses. De plus, le coefficient de transfert de chaleur est également au moins deux fois plus élevé pour l’eau. Ce coefficient mesure la transmission d’énergie thermique des parois au fluide (par ex. perçages des canaux de thermorégulation).

Un autre avantage de l’eau réside dans sa faible viscosité qui - à l’inverse de celle des huiles caloporteuses - reste quasi constante tout au long de l’utilisation. Avec en plus un avantage écologique : la manipulation et l’élimination de l’eau ne posent aucun problème. Souvent, le facteur du coût joue un rôle considérable.

Un autre avantage de l’eau réside dans sa faible dilatation. Cet avantage prend toute son importance avec des consommateurs nécessitant de grandes quantités de fluide caloporteur. Exemple : si on réchauffe 100 litres d’eau de 20 à 140 °C, le volume augmente de quelque 7,4 litres ; avec de l’huile par contre, il augmenterait d’environ 10,2 litres. Les thermorégulateurs à huile nécessitent donc un plus grand vase d'expansion en raison de la plus grande augmentation de volume.

Autres caractéristiques positives : l’eau ne cokéfie pas. Cet avantage permet de concevoir des thermorégulateurs présentant une puissance spécifique de chauffage relativement élevée, c.-à-d. des régulateurs plus petits et meilleur marché. Et surtout, l’eau présente l’avantage de ne pas être inflammable.

Ces nombreux avantages font que l’eau s’impose de plus en plus comme fluide caloporteur.

Certains utilisateurs préfèrent ne pas utiliser d’appareils à eau sous pression en raison de la sécurité. Avec une température de service de 250 °C, la pression du système dépasse les 38 bar. La pression côté départ peut alors atteindre les 50 bar vu que la pression de pompe (en fonction des consommateurs raccordés) vient encore s’ajouter à la pression du système. Par conséquent, il faut utiliser des flexibles et raccords ad hoc et contrôler chaque jour le circuit de thermorégulation.

Si ces conditions sont réunies, la sécurité ne constitue plus un argument pour renoncer à l’eau comme fluide caloporteur.

Avec des consommateurs qui n'autorisent qu'une faible pression (par exemple des réservoirs à enveloppe double), il faut éviter l'eau comme fluide caloporteur en présence de températures plus élevées car la pression du système dépasse souvent à elle seule la pression admissible. Il n’y a dans ce cas pas d’autre alternative à l’utilisation d’huile caloporteuse. En raison des avantages majeurs susnommés, l’eau est très prisée comme fluide caloporteur. Il convient toutefois de considérer ce point : l’utilisation d’eau ne pose en général aucun problème jusqu’à environ 60 °C.

À mesure que les températures augmentent, les problèmes mentionnés à la section 2 peuvent survenir. Par conséquent, la plupart des fabricants de thermorégulateurs limitent la température de départ maximum à quelque 200 °C, il peut y avoir ici et là des régulateurs dont la limite va jusqu’à 250 °C. Ces températures génèrent au sein du régulateur une pression de système très élevée (sans compter la pression de pompe) de quelque 40 bar. Une telle valeur n’est pas sans problème au niveau de la sécurité. En outre, l’eau se comporte autrement à de telles températures qu’à 60 °C. Les utilisateurs ne sont souvent pas conscients de cet état de fait.

L’eau potable qui était utilisée comme fluide caloporteur dans le circuit de thermorégulation et pour le refroidissement des thermorégulateurs n’entraînait que rarement des problèmes comme par ex. la corrosion. En effet, les régulateurs se caractérisaient alors par des températures de service relativement faibles. Mais avec l’apparition de matières plastiques de haut de gamme, il fallait néanmoins des températures de moule plus élevées, ce qui entraîna une aggravation des problèmes.

Comme il n’y a pratiquement plus aucune entreprise qui peut se permettre d’utiliser de l’eau potable à cause du coût et de la protection de l’environnement, on installe des systèmes d’eau de refroidissement qui dissipent souvent la chaleur générée via des tours de réfrigération. L’eau de circulation est en général traitée et la plupart des utilisateurs sont alors persuadés que la qualité de l’eau dépasse de loin les exigences. Ceci peut être le cas pour des températures jusqu’à environ 40 °C, températures pour lesquelles on utilise l’eau en premier lieu.

L’eau de circulation ne sert toutefois pas uniquement au refroidissement des thermorégulateurs, mais aussi de fluide de circulation. Cette « double affectation » de l’eau s’accompagne d’un problème:

L’eau mise en œuvre comme eau de refroidissement est également utilisée pour des températures jusqu’à 180 °C voire plus. Elle n’est normalement pas prévue pour cela.
Pour éviter les problèmes ci-dessous, l’eau utilisée comme fluide de circulation doit répondre aux conditions suivantes:

Titre hydrotimétrique4–18 °dH
Dureté carbonatée2–12 °dH
pH7–9 ECC
Conductivitémax. 1000 µS/cm

 

L’équilibre calco-carbonique (ECC) est le meilleur indicateur de la qualité de l’eau. L’eau en équilibre calco-carbonique (déterminé par le pH) est dans tous les cas idéale pour servir de fluide caloporteur, qu’elle soit douce ou mi-dure.

Le respect de ces valeurs ne suffit malheureusement pas pour résoudre tous les problèmes. Au sein de régulateurs à « bain chauffant », l’eau s’évapore fortement, surtout à des températures de quelque 90 °C. Au cours du processus, on perd de l’eau pure sous forme de vapeur d'eau. Tous ces composants restent toutefois dans le circuit. Il faut alors faire et refaire l’appoint à partir du circuit de refroidissement, de sorte qu’avec le temps, on observe un épaississement de l’eau. Une mesure de la conductivité permet de déterminer le niveau d’épaississement de l’eau.

Exemple : lorsque l’eau d’appoint (provenant du système de refroidissement) présente une conductivité de 500 µS/cm et l’eau du circuit de thermorégulation 1000 µS/cm, on est en présence d’un double épaississement. La règle est comme suit :   si la conductivité dépasse 1500 µS/cm, il faut remplacer l’eau. L’épaississement s’accompagne également d’une augmentation de la dureté. L’eau dure entraîne l’entartrage des conduites, des canaux de thermorégulation et surtout des éléments de chauffage au sein du thermorégulateur. Comme la température de surface des éléments est très élevée lors de la phase de chauffage, des incrustations se forment et au-delà de 100 °C du tartre.

Ces deux types de dépôts sont très durs et quasi insolubles. Ces dépôts forment une couche isolante. Ceci entrave fortement le transfert de chaleur entre l’élément de chauffage et l’eau de circulation. On observe alors une forte surchauffe des éléments de chauffage, pouvant même entraîner leur destruction. L’entartrage des canaux de thermorégulation entrave en outre l’échange de chaleur et le débit, de sorte que la thermorégulation optimale du consommateur ne soit plus garantie.

Un niveau élevé d’épaississement peut causer un enrichissement en sels et avec lui de la corrosion. L’oxygène et le dioxyde de carbone présents dans l’eau peuvent également entraîner des phénomènes de corrosion. L’oxygène provoque des cratères ponctuels et une corrosion par piqûres (figure 3), le dioxyde de carbone entraîne une érosion uniforme.

La dégradation matérielle des composants (par ex. le rotor d’une pompe) peut aussi être le fruit de la cavitation causée par les micro-impacts de l'eau. Ce sont ici des jets de liquide qui heurtent le matériau avec des pointes de pression jusqu’à 100000 bar (105 bar).

Le pH est un critère d’évaluation majeur de l’eau. Celui-ci détermine le comportement à la corrosion des différents matériaux. Un pH compris entre 8,5 et 9,5 constitue un bon compromis. Un pH plus élevé serait certes meilleur pour l’acier mais risque d’attaquer le cuivre. En présence d’aluminium, il faut réduire le pH car la résistance à la corrosion de ce métal n’est garantie qu’avec un pH entre 5 et 8,3.

Mesures incombant au fabricant de régulateurs
La sélection de matériaux et de mesures structurelles appropriés permet de fabriquer des thermorégulateurs compatibles avec l’eau. En ce qui concerne la résistance à la corrosion, l’acier inoxydable représente la meilleure solution pour tous les composants en contact avec l’eau. Toutefois, on n’utilise souvent l’acier inoxydable que pour le réservoir, cela à cause du coût. D’autres matériaux inoxydables comme par ex. le laiton, le bronze et le cuivre sont utilisés pour les pompes, les conduites et les refroidisseurs. Les thermorégulateurs à eau sous pression de haut de gamme peuvent toutefois contenir des pompes en acier inoxydable avec arbre en céramique, rotor en PEEK et paliers en SiC.

Si les matériaux mis en œuvre jouent sur la durée de vie des thermorégulateurs, la construction des composants correspondants peut également avoir une grande influence sur cette durée de vie. Le fabricant peut par ex. éviter dans une large mesure les dommages dus à la cavitation par le biais de mesures structurelles.

Mesures incombant à l’exploitant
Souvent, l’exploitant pense qu’il suffit de brancher le régulateur sur le circuit d’eau de refroidissement existant pour le faire fonctionner. Comme on l’a expliqué à la section 2, cela ne fonctionne que très rarement.

Comme l’utilisation de l’eau comme fluide de circulation est souvent la source de problèmes, il convient d’en tenir compte. Un spécialiste externe est en général consulté pour le traitement de l’eau de refroidissement. Sur la base de notre expérience, celui-ci suppose que l’eau n’est utilisée qu’à des fins de refroidissement, et ce, à des températures faibles.

Pour garantir le traitement correct de l’eau, le spécialiste doit impérativement savoir que l’eau de refroidissement est également utilisée comme fluide de circulation dans des thermorégulateurs fonctionnant à température de service élevée (> 40 °C). Comme on l’a déjà souligné, une température plus élevée exige également un traitement spécifique de l’eau.

Pour différentes raisons, la qualité requise pour l’eau de refroidissement n’est souvent pas atteinte. Dans ce cas, les thermorégulateurs peuvent être remplis manuellement ou on prévoit une alimentation séparée pour l’eau de circulation dans le circuit de thermorégulation.

L’eau de circulation de l’entreprise n’est alors utilisée que pour le refroidissement du régulateur. On peut ainsi utiliser pour le remplissage une eau spécialement traitée et minutieusement adaptée aux exigences. Comme il s’agit souvent de quantités relativement faibles, le traitement de cette eau est largement moins onéreux que le traitement complet de l’eau de refroidissement. En outre, il est nettement plus simple de veiller à la qualité d’un petit volume d’eau.

Si la qualité du circuit de refroidissement ne permet pas de répondre aux exigences et s’il n’est pas possible de prévoir un circuit séparé pour le remplissage du régulateur, la seule alternative est le traitement de l’eau au sein du régulateur lui-même. On trouve à cet égard des inhibiteurs de corrosion spéciaux qui agissent non seulement contre la corrosion, mais s’accompagnent également de maints avantages. Vous trouverez de plus amples détails sur de tels produits dans la section suivante.

Il s’agit ici de l’inhibiteur de corrosion RK93 de la société Regloplas. Ce produit se caractérise par une large palette d’effets : un film étanche aux gaz - agissant comme un isolant diélectrique - se forme sur les parois et les surfaces. Les métaux – aussi non-ferreux – ne sont ainsi plus attaqués par les substances contenues dans l’eau. La corrosion d'oxygène (piqûre de corrosion) est évitée et plus aucun dépôt ne peut se former. Cette couche protectrice subsiste même après la vidange de l’eau. Elle empêche donc également la rouille volante dans les canaux de refroidissement des outils lors de leur stockage.

Le RK93 stabilise les composants de l’eau de refroidissement, empêche les dépôts sur les conduites, les canaux de refroidissement et les éléments de chauffage et évite la cristallisation du calcaire. En cas de dépassement de la capacité de l’eau, le calcaire et les autres composants se précipitent sous forme de boue. Celle-ci se laisse aisément éliminer par un rinçage à l’eau. Il n’y a alors plus de formation de tartre.

Le RK93 améliore le transfert de chaleur au moule, prévient une surchauffe locale et prolonge la durée de vie du régulateur et des consommateurs raccordés. On peut alors utiliser de l’eau potable normale sans autre traitement spécial. L’eau désionisée (distillée) peut également être mise en œuvre. En raison de son agressivité, celle-ci ne convient toutefois pas pour une utilisation dans des thermorégulateurs sans autre traitement. En revanche, elle n’a presque pas de composants - calcaire et sels - et ne contribue donc pas à l’entartrage ni à la précipitation de boues :les circuits restent propres. L’ajout de RK93 fait perdre son agressivité à l’eau.

Le RK93 a été spécialement développé pour une mise en œuvre dans les thermorégulateurs. Il est par conséquent compatible avec des températures élevées jusqu’à 180 °C et s’avère nettement plus efficace que les autres additifs en raison de l’effet de synergie des différents composants.

Comme le RK93 - à l’instar de tous les autres inhibiteurs de corrosion - fait augmenter le pH, il convient de faire attention avec l’aluminium car celui-ci ne résiste que jusqu’à un pH entre 5 et 8,3. Si le circuit contient de l’aluminium, le pH doit être contrôlé. S’il est supérieur à 8,5, l’aluminium est attaqué. Il faut alors dans ce cas réduire le dosage d’inhibiteur de corrosion.

Pour des températures jusqu’à quelque 250 °C, l’eau est à privilégier comme fluide caloporteur en raison des nombreux avantages cités (propriétés de transmission de chaleur nettement supérieures à celles de l’huile, inoffensive sur le plan écologique, faible coût). L’utilisateur doit néanmoins être pleinement conscient des éventuels problèmes cités. L’essentiel est la qualité de l’eau utilisée comme fluide de circulation au sein du circuit de thermorégulation. La « qualité de l’eau de refroidissement » ne suffit pas à elle seule ; l’eau doit également être compatible avec une utilisation aux hautes températures de service des thermorégulateurs. Comme le fabricant de régulateurs n’a aucune influence sur ce point, ce point incombe en premier lieu à l’exploitant. Ce dernier doit en effet veiller à disposer d’une eau appropriée. Il est en revanche de l’intérêt du fabricant de régulateurs ou du fournisseur de collaborer avec l’exploitant pour trouver une solution optimale.